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Il arrive encore trop souvent que la planification de succession se trouve uniquement envisagée sous l'angle fiscal : le patrimoine doit parvenir à la génération suivante mais en étant aussi peu amputé que possible par des prélèvements fiscaux de toute nature. Dans ce cadre, on a souvent recours à la donation.
Les donations s'effectuent souvent à un âge où l'espérance de vie statistique du donateur est encore relativement longue. Le temps qui reste à vivre n'est toutefois pas une certitude statistique, mais un élément différent pour chaque individu. De plus, il est très difficile de déterminer quelle partie du patrimoine peut être librement donnée et quelle autre partie doit être conservée pour financer ses vieux jours. Nous remarquons dès lors que les donations intègrent fréquemment toutes sortes de mécanismes afin de permettre aux donateurs de percevoir encore des revenus du patrimoine qu'ils ont donné, de conserver un pouvoir de décision et même, de manière indirecte, de pouvoir exploiter ce qui a été cédé par donation.
De tels mécanismes ne sont pas sans danger. Juridiquement, il convient de vérifier si les conséquences d'une donation ne sont pas susceptibles de causer des suites civiles ou fiscales non désirées.
Un des arguments en faveur d'une mise en œuvre rapide d'une donation réside dans le fait que pour pouvoir disposer de son patrimoine, il faut être sain d'esprit. À mesure que l'on vieillit, le risque augmente de ne plus pouvoir satisfaire à cette condition, ce qui bloquerait toute planification ultérieure.
Depuis l'entrée en vigueur du mandat extrajudiciaire (1er septembre 2014), il est désormais possible de temporiser un peu dans le cadre d'une planification de succession. Ce mandat permet en effet au mandant de désigner un ou plusieurs mandataires qui peuvent poser aussi bien des actes de gestion que des actes de disposition.
Les actes de gestion permettent plus facilement au mandant de faire procéder par le mandataire à des actes relevant de la gestion quotidienne. Il s'agit ici d'actes posés pour le compte du mandant en matière de conclusion et de suivi de contrats de bail, de perception de loyers, de réalisation d'opérations bancaires, de souscription des polices d'assurance nécessaires, de réinvestissement des titres venus à échéance, de représentation vis-à-vis des pouvoirs publics,…
Cependant, dans le cadre de l'organisation de la planification de la succession, la possibilité pour le mandant de permettre au mandataire de poser des actes de disposition est bien plus importante. Le mandat extrajudiciaire peut déterminer les circonstances dans lesquelles le mandataire peut procéder à la vente, voire à la donation de biens (mobiliers ou immobiliers). Des couples pourraient prévoir qu'en cas d'incapacité d'un des partenaires, l'autre partenaire détiendra un mandat lui donnant le pouvoir de donner aux héritiers son propre patrimoine ou le patrimoine commun. En cas de prédécès, ou si cet autre partenaire devenait lui-même incapable, ce pouvoir pourrait être attribué à un ou plusieurs tiers, agissant conjointement ou non, généralement les enfants/héritiers.
Ces actes de disposition peuvent être assortis de conditions. C'est ainsi par exemple que la vente, voire la donation de l'habitation, pourraient être autorisées lorsque le mandant a dû quitter définitivement le logement selon des modalités objectivement constatées, pour être hébergé dans une institution de soins, et que le mandant n'est plus mentalement capable de poser encore lui-même des actes de disposition. À titre complémentaire, il pourrait être déterminé que les donations relatives à l'habitation ou à la somme d'argent reçue à ce sujet ne soient possibles qu'à la condition de financer l'hébergement du donateur représenté.
Lorsque le mandat est donné par des époux, il peut également prévoir que le mandataire, en cas d'incapacité de l'époux survivant, disposera d'un pouvoir de décision s'agissant de l'application des dispositions du contrat de mariage relatives à l'attribution du patrimoine au conjoint survivant, en faisant intervenir une clause d'attribution optionnelle ou une clause de participation. Une possibilité se trouve ainsi de nouveau ouverte de procéder au choix le plus approprié. Dès lors, la synergie avec les autres pouvoirs prévus dans le cadre du mandat extrajudiciaire doit conduire à une situation idéale en termes de confort pour la personne âgée comme d'optimalisation fiscale.
Une bonne planification de succession comporte donc différents volets. Le patrimoine qui est objectivement superflu devra être approché d'une autre manière que celui dont le donateur doit pouvoir encore disposer. Il est nécessaire d'assurer un suivi au fil des années et il est préférable de s'organiser de manière à permettre encore des adaptations ultérieures. Une bonne analyse et un projet correct sont autant de gages d'une sécurité renforcée. À cet égard, le mandat extrajudiciaire constitue assurément un élément incontournable.
Patrick Moonen,
Directeur du Centre de Compétences
PROGENTIS S.A.